(J'arrive toujours pas à mettre ça sur BBBC. Alors je le place là)
Il faut du vin aux skavs et de l'eau pour leur ballon
Il était arrivé quatre nouveaux BloodBowleurs, à la mine sombre, sanguinolente et très patibulaire. Deux vrais vermines, au blocage fourbe mais efficace. Et les deux autres sans réel profil, mais plutôt plantés de trois quart. Pas très ravissants, mais rapides à la descente. L’un d’eux, l’air revêche, les dents effroyablement aiguisées, était connu dans le milieu sous le nom de Rat-Kham le Rouge. Les autres, on n’allait pas tarder à les connaître aussi …
Bat Gob songeait tristement ; car, quoiqu'il n'eût que huit ans de jeu derrière lui, il avait déjà tant souffert qu'il rêvait avec l'air lugubre d'une vieille pom-pom girl mise au rancart depuis des lustres.
Il avait la paupière noire d'une châtaigne que Trueg le Troll lui avait donnée, ce qui faisait dire de temps en temps à son féroce co-équipier : - Est-il laid avec son pochon sur l'oeil! Tu t’es pris une balle à pointes en travers de la tronche, ou quoi ? Et où qu’zont passées toutes les ratiches qui t’manquent ? Et il s’en trouvait tout régénéré, de lancer cela à son équipier.
Bat Gob pensait donc qu'il était nuit, très nuit, qu'il avait fallu remplir à l'improviste les pots et les carafes près des places des BloodBowleurs survenus, et qu'il n'y avait plus d'eau dans le vestiaire.
Ce qui le rassurait un peu, c'est qu'on ne buvait pas beaucoup d'eau chez les Flagen Kaezh. Il ne manquait pas là de joueurs qui avaient soif; mais c'était de cette soif qui s'adresse plus volontiers au broc qu'à la cruche. Qui eût demandé un verre d'eau parmi ces verres de vin eût semblé une musaraigne à tous ces surmulots. Il y eut pourtant un moment où le gobelin trembla: Trueg souleva le couvercle d'une casserole qui bouillait sur le fourneau, puis saisit un verre et s'approcha vivement de l’évier. Il tourna le robinet, le gob avait levé la tête et suivait tous ses mouvements. Un maigre filet d'eau coula du robinet et remplit le verre à moitié. - Tiens, dit-il, Y a plus d'eau! Puis le gros débile eut un moment de silence.
Le gob ne respirait pas.
- Bah, reprit Trueg en examinant le verre à demi plein, y en aura assez gomme ça.
Bat Gob se remit à dénouer les lacets de ses chaussures, mais pendant plus d'un quart d'heure il sentit son coeur sauter comme un gros flocon dans sa poitrine. Un peu plus loin, tapis dans l’ombre, HulGob et Iron Gob n’en menaient pas plus large et faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour se faire oublier autant que possible. Quant à Captain Gob, comme toujours dans ces moments-là, il y avait bien longtemps qu’il avait filé, se servant des autres comme d’un bouclier gobelin.
Les minus à la peau verte comptaient les minutes qui s'écoulaient ainsi, et eurent bien voulu être au lendemain matin.
De temps en temps, un des skavens imbibés regardait par la fenêtre, en direction du terrain, et s'exclamait: - Il fait noir comme dans un four! - Ou: - Il faut être chat pour aller sur le stade sans lanterne à cette heure-ci! - Et Bat Gob tressaillait.
Tout à coup, l’un des deux lanceurs resté plus longtemps dans le couloir des vestiaires arriva, et dit d'une voix dure:
- On n'a pas regonflé mon ballon.
- Bah zi, dit Trueg.
- Je vous dis que non, le Troll, reprit le lanceur. Bat Gob était sorti de dessous la table.
- Oh! si! monsieur! dit-il, le ballon est gonflé, et même que c'est moi qui l’ai gonflé, et j’ai même soufflé dedans avant.
Cela n'était pas vrai. Bat Gob mentait.
- En voilà un qu’est gros comme le poing et qui ment gros comme la maison, s'écria le lanceur. Je te dis qu'il n'est pas gonflé, poids plume! Il a une manière de rebondir quand il n'a pas été bien gonflé que je connais bien.
Bat Gob persista, cherchant à esquiver et ajouta d'une voix enrouée par l'angoisse et qu'on entendait à peine:
- Et même qu'il s’est bien gonflé!
- Allons, reprit le lanceur avec animosité, ce n'est pas tout ça, qu'on gonfle mon ballon et que cela finisse! Je vous préviens, je ne laisserai pas passer ça ! Et il remplit son verre à ras-bord, avec une belle dextérité, avant de l’enfiler cul-sec, comme pour mieux marquer son mécontentement.
Bat Gob retourna sous la table.
- Y a du vrai, dit Trueg, zi l’est pas bien gonflé, faut l’remplir. Quand tu l’trempes bien dans l’eau, le zambon, y ss’dézale. Bah l’ballon, lui, y ss’gonfle !
Puis, regardant autour de lui:
- Eh bien, où est donc c’t’autre?
Ilse pencha et découvrit le gob blotti à l'autre bout de la table, presque sous les pieds des buveurs.
- Vas-tu venir? cria Trueg.
Bat Gob sortit de l'espèce de trou où il s'était caché. Le Troll reprit:
- P’tit Minus-à-la-peu-verdâtre, va gonfler z’foutu ballon.
- Mais, Trueg, dit Bat Gob faiblement, c'est qu'il n'y a pas d'eau.
Le Troll ouvrit toute grande la porte du vestiaire.
- Eh ben, va en chercher!
Bat Gob baissa la tête, et alla prendre un seau vide qui était au coin de la cheminée.
Ce seau était plus grand que lui, et le poids plume aurait pu s'asseoir dedans et y tenir à l'aise.
Trueg se remit à son fourneau, et, très affamé, goûta avec une cuillère de bois ce qui était dans la casserole, tout en grommelant:
- Il y en a près du ztade. Ze n'est pas plus malin que za. Va d’mander à la Zerveuse de Budweiser, zi tu la trouves. Ze crois que z'aurais mieux fait d’ te foutre un plus gros gnon.
Puis il fouilla dans un gros sac où il y avait des sous pour les pots-de-vin, un casque à pointe assez petit et un bon gros poing américain pour les châtaignes.
- Tiens, m’zieu Crapeau, ajouta-t-il, en revenant tu graizeras la patte de l’arbitre, z’il est encore dans l’coin. V’là une pièze de quinze sous.
Bat Gob avait une petite poche de côté à son short ; il prit la pièce sans dire un mot, et la mit dans cette poche.
Puis il resta immobile, le seau à la main, la porte ouverte devant lui. Il semblait attendre qu'on vînt à son secours.
- T’iras ! cria Trueg.
Le gob sortit. La porte se referma.
Il faut du vin aux skavs et de l'eau pour leur ballon
Il était arrivé quatre nouveaux BloodBowleurs, à la mine sombre, sanguinolente et très patibulaire. Deux vrais vermines, au blocage fourbe mais efficace. Et les deux autres sans réel profil, mais plutôt plantés de trois quart. Pas très ravissants, mais rapides à la descente. L’un d’eux, l’air revêche, les dents effroyablement aiguisées, était connu dans le milieu sous le nom de Rat-Kham le Rouge. Les autres, on n’allait pas tarder à les connaître aussi …
Bat Gob songeait tristement ; car, quoiqu'il n'eût que huit ans de jeu derrière lui, il avait déjà tant souffert qu'il rêvait avec l'air lugubre d'une vieille pom-pom girl mise au rancart depuis des lustres.
Il avait la paupière noire d'une châtaigne que Trueg le Troll lui avait donnée, ce qui faisait dire de temps en temps à son féroce co-équipier : - Est-il laid avec son pochon sur l'oeil! Tu t’es pris une balle à pointes en travers de la tronche, ou quoi ? Et où qu’zont passées toutes les ratiches qui t’manquent ? Et il s’en trouvait tout régénéré, de lancer cela à son équipier.
Bat Gob pensait donc qu'il était nuit, très nuit, qu'il avait fallu remplir à l'improviste les pots et les carafes près des places des BloodBowleurs survenus, et qu'il n'y avait plus d'eau dans le vestiaire.
Ce qui le rassurait un peu, c'est qu'on ne buvait pas beaucoup d'eau chez les Flagen Kaezh. Il ne manquait pas là de joueurs qui avaient soif; mais c'était de cette soif qui s'adresse plus volontiers au broc qu'à la cruche. Qui eût demandé un verre d'eau parmi ces verres de vin eût semblé une musaraigne à tous ces surmulots. Il y eut pourtant un moment où le gobelin trembla: Trueg souleva le couvercle d'une casserole qui bouillait sur le fourneau, puis saisit un verre et s'approcha vivement de l’évier. Il tourna le robinet, le gob avait levé la tête et suivait tous ses mouvements. Un maigre filet d'eau coula du robinet et remplit le verre à moitié. - Tiens, dit-il, Y a plus d'eau! Puis le gros débile eut un moment de silence.
Le gob ne respirait pas.
- Bah, reprit Trueg en examinant le verre à demi plein, y en aura assez gomme ça.
Bat Gob se remit à dénouer les lacets de ses chaussures, mais pendant plus d'un quart d'heure il sentit son coeur sauter comme un gros flocon dans sa poitrine. Un peu plus loin, tapis dans l’ombre, HulGob et Iron Gob n’en menaient pas plus large et faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour se faire oublier autant que possible. Quant à Captain Gob, comme toujours dans ces moments-là, il y avait bien longtemps qu’il avait filé, se servant des autres comme d’un bouclier gobelin.
Les minus à la peau verte comptaient les minutes qui s'écoulaient ainsi, et eurent bien voulu être au lendemain matin.
De temps en temps, un des skavens imbibés regardait par la fenêtre, en direction du terrain, et s'exclamait: - Il fait noir comme dans un four! - Ou: - Il faut être chat pour aller sur le stade sans lanterne à cette heure-ci! - Et Bat Gob tressaillait.
Tout à coup, l’un des deux lanceurs resté plus longtemps dans le couloir des vestiaires arriva, et dit d'une voix dure:
- On n'a pas regonflé mon ballon.
- Bah zi, dit Trueg.
- Je vous dis que non, le Troll, reprit le lanceur. Bat Gob était sorti de dessous la table.
- Oh! si! monsieur! dit-il, le ballon est gonflé, et même que c'est moi qui l’ai gonflé, et j’ai même soufflé dedans avant.
Cela n'était pas vrai. Bat Gob mentait.
- En voilà un qu’est gros comme le poing et qui ment gros comme la maison, s'écria le lanceur. Je te dis qu'il n'est pas gonflé, poids plume! Il a une manière de rebondir quand il n'a pas été bien gonflé que je connais bien.
Bat Gob persista, cherchant à esquiver et ajouta d'une voix enrouée par l'angoisse et qu'on entendait à peine:
- Et même qu'il s’est bien gonflé!
- Allons, reprit le lanceur avec animosité, ce n'est pas tout ça, qu'on gonfle mon ballon et que cela finisse! Je vous préviens, je ne laisserai pas passer ça ! Et il remplit son verre à ras-bord, avec une belle dextérité, avant de l’enfiler cul-sec, comme pour mieux marquer son mécontentement.
Bat Gob retourna sous la table.
- Y a du vrai, dit Trueg, zi l’est pas bien gonflé, faut l’remplir. Quand tu l’trempes bien dans l’eau, le zambon, y ss’dézale. Bah l’ballon, lui, y ss’gonfle !
Puis, regardant autour de lui:
- Eh bien, où est donc c’t’autre?
Ilse pencha et découvrit le gob blotti à l'autre bout de la table, presque sous les pieds des buveurs.
- Vas-tu venir? cria Trueg.
Bat Gob sortit de l'espèce de trou où il s'était caché. Le Troll reprit:
- P’tit Minus-à-la-peu-verdâtre, va gonfler z’foutu ballon.
- Mais, Trueg, dit Bat Gob faiblement, c'est qu'il n'y a pas d'eau.
Le Troll ouvrit toute grande la porte du vestiaire.
- Eh ben, va en chercher!
Bat Gob baissa la tête, et alla prendre un seau vide qui était au coin de la cheminée.
Ce seau était plus grand que lui, et le poids plume aurait pu s'asseoir dedans et y tenir à l'aise.
Trueg se remit à son fourneau, et, très affamé, goûta avec une cuillère de bois ce qui était dans la casserole, tout en grommelant:
- Il y en a près du ztade. Ze n'est pas plus malin que za. Va d’mander à la Zerveuse de Budweiser, zi tu la trouves. Ze crois que z'aurais mieux fait d’ te foutre un plus gros gnon.
Puis il fouilla dans un gros sac où il y avait des sous pour les pots-de-vin, un casque à pointe assez petit et un bon gros poing américain pour les châtaignes.
- Tiens, m’zieu Crapeau, ajouta-t-il, en revenant tu graizeras la patte de l’arbitre, z’il est encore dans l’coin. V’là une pièze de quinze sous.
Bat Gob avait une petite poche de côté à son short ; il prit la pièce sans dire un mot, et la mit dans cette poche.
Puis il resta immobile, le seau à la main, la porte ouverte devant lui. Il semblait attendre qu'on vînt à son secours.
- T’iras ! cria Trueg.
Le gob sortit. La porte se referma.